Saison photo 2024 à l’Abbaye Royale de l’Epau, près du Mans.
Du 7 juin au 3 novembre 2024 l’abbaye de l’Epau accueille pour la 12ème fois un parcours photographique réunissant 6 photographes dont les travaux sont exposés dans le parc de 13 hectares.
Le thème du parcours photographique de 2024 est « Dans les Herbes Hautes » avec dans l’idée d’intégrer de plus en plus les œuvres des artistes au parc. L’affiche de cette année pour la première fois ne présente pas seulement une photo emblématique de la sélection mais une photo dans le parc avec des visiteurs rappelant que le principe même de ce parcours est de cheminer dans la nature cadre d’exposition naturel et changeant rendant chaque expérience de visite unique selon le temps et la période de la journée.
Comme chaque année cette saison consacrée à la photographie se poursuit sur les grilles de l’Hôtel du Département sur deux écluses de la Sarthe et à la gare du Mans.
Cette année 8 classes de collégiens exposent leurs travaux réalisés au cours avec leurs professeurs et un photographe professionnel dans la clairière du parc. Une fois de plus outre le travail photographique chaque classe a développé un concept et un message fort et ont travaillé aussi scénographie de leurs photographies en créant des espaces temporaires d’exposition et ajoutant de la poésie et des installations artistiques.
La démarche est riche de créativité et de trouvailles comme la création d’un espace de labyrinthe où des filtres de lumière de couleur sont installés en hauteur plongeant les couloirs dans des atmosphère de lumière liées au photographies exposées associées à des sentiments.
Les installations créées en 2021 sont toujours là, le Sténopé (jusqu’au 4 juillet) et Rhombus Berangeria.
Kurdistan, vivre sous les arbres par Hiên Lâm Duc.
Photographe reporter Hiên Lâm Duc est franco-laotien a couvert la Guerre du Golfe en Irak au cours de laquelle il a découvert le quotidien des populations des Kurdistan, victimes de la guerre ils vivent dans une région montagneuse où se sont ajoutés à l’échiquier des affrontements l’état islamique.
C’est dans ce contexte qu’il nous raconte en noir et blanc une histoire d’arbres et d’enfants sur 20 années.
Tout part d’une photo prise où des enfants font de la balançoire aux branches d’un vieil arbre, le cliché est pris et quelques temps plus tard le photographe essaye de retrouver l’emplacement de cet arbre dont il a oublié la localisation. Commence alors un jeu de pistes pour retrouver le lieu de cette photo. Ils posent des questions et on lui indique la localisation d’arbres mais jamais le bon mais en même temps les gens reconnaissent les enfants sur la photo qui ne sont plus des inconnus et dont il apprend ce qui leur est arrivé. S’ajoutent alors d’autres arbres et d’autres personnes prises en photo dessous, d’autres histoires s’ajoutent jusqu’à ce qu’il retrouve enfin l’arbre qui au final est devenu plus qu’un simple cliché mais témoin de la vie des populations de Kurdistan.
Les clichés choisis sont exposés sous à l’ombre de l’allée de platanes à l’entrée de l’abbaye. La mise en scène met en parallèle la beauté du noir et blanc et des photos du Kurdistan sous les tonalités vertes des arbres. Les photos prises en paysage contrastent avec la verticalité des troncs des arbres et donnent le ton de cette édition 2024.
De l’image au rêve, impressions végétales de Bernard Reignier.
Bernard Reignier s’est lancé dans une expérimentation avec la photographie. L’idée était de donner dans l’instantané d’un cliché un mouvement, de faire de la photo dynamique.
Il part sur des paysages et pendant le moment de pose de la photo fait bouger l’appareil captant alors la lumière de manière différente en une seule fois.
Les paysages deviennent peinture de la lumière et on retrouve quelque chose des impressionnistes dans les œuvres du photographe.
Choix a été fait d’exposer ces expériences visuelles sur les murs extérieurs de l’abbaye. Les pierres contrastent bien avec les photos qui ont quelque chose de féériques.
Le Sport au Cœur, portraits d’une passion de Gérard Uféras.
Gérard Uféras s’est attaché à suivre plusieurs sportifs et sportives dans l’exercice de leur passion.
Chaque panneau leur rend hommage tant en pleine actions que lors de moments avant ou après l’effort, instants de concentration ou de détente.
L’ensemble dessine un portrait et le témoignage d’un lien fort avec le sport dans les valeurs qu’il met en avant.
Pour pousser plus loin l’expérience chaque panneau a un QRcode qui permet d’accéder à une vidéo de quelques minutes en lien avec la sportive ou le sportif exposé.
C’est une démarche transmédia que nous propose Gérard Uféras à la fois en jetant la lumière sur des anonymes comme de grands sportifs connus et poussant le lien avec le visiteur grâce à la vidéo. La photographie devient la porte vers une connexion dépassant le simple visuel.
Entre Terre et Mer de Nicolas T. Camoisson
Après avoir longuement vécu au Moyen Orient entre le Liban et la Syrie Nicolas T. Camoisson est photographe et calligraphe. Il arrive en Gironde où il a obtenu une résidence artistique au phare de Cordouan, classé au patrimoine mondial de l’UNESCO. Poussant le lien à l’océan toujours plus loin il décide de devenir marin et apprendre à manœuvrer en mer.
De toutes ces expériences Il se met à créer et capturer avec son appareil la beauté l’océan mais aussi la richesse des côtes et la variété des formes de sa biodiversité.
Il propose une série de clichés allant du paysage, à la photographie des éléments du phare, de l’humeur changeante de l’océan aux détails des plantes le peuplant.
La promenade pour découvrir son exposition se fait le long du verger de l’abbaye et s’achève par un cliché saisissant de la fureur de l’océan qui émerge au milieu des hautes herbes de la prairie derrière l’abbaye, une mise en scène spectaculaire qui accroche l’œil immédiatement.
Portrait de Graines de Thierry Ardouin
Les graines sauvages comme cultivées font l’objet d’un suivi précis même dans les hybridations qui sont réalisées dans la production alimentaire. Depuis 1820 le Museum national d’Histoire Naturelle à Paris entretient une collection de celles-ci les faisant pousser et récolter de nouvelles graines afin d’entretenir celles-ci et préserver leur patrimoine.
Thierry Ardouin s’est lancé dans un corpus de 250 portraits de ces graines afin d’en faire découvrir les variétés de formes et couleurs. Ces photos sont réalisées via un microscope révélant aussi les moyen qu’elles choisissent pour essaimer, certaines ayant des crochets pour s’accrocher aux animaux passant à proximité, d’autres déployant un voile pour que l’air les emporte au loin, etc..
La sélection faite parmi la série complète est un aperçu de l’ingéniosité des plantes et de la beauté que réserve ses minuscules d’où naissent leurs, céréales, fruits, légumes, arbres.
Le long du sentier menant à la forêt au fond du domaine de l’abbaye sont exposés ces photographies prises avec un fond uni noir ou blanc. La mise en scène des photos a été pensée en collaboration avec les équipes paysagistes de l’Epau avec comme idée de faire pousser au pied des photos des plantes qui petit à petit au cours de la durée de la saison photographique pousseront habillant les photos de graines avec des plantes qui furent le résultat de graines, une image très poétique mêlant photographie et vivant.
Spirits Unseen de Myrto Papadopoulos
Myrto Papadopoulos est une artiste athénienne qui est allée à la rencontre de la minorité Pomak vivant dans les montagnes de Thrace en Grèce, allant à la rencontre des femmes de cette communauté. Si les hommes de cette communauté sont partis à l’étranger pour trouver du travail elles restent dans cette région aspirant à étudier, travailler et s’émanciper de l’héritage patriarcal afin de gagner leur place.
Les portraits et moments capturées par la photographe s’équilibrent entre modernité et tradition et un lien fort avec la nature.
Cette ultime étape du parcours 2024 est installée le long d’un canal et utilise des cubes flottant sur l’eau d’où les photos se reflètent dans l’eau et des ensembles de photos suspendues entre les branches et qui ont été imprimées sur un matériau semi-transparent. Les photos bougent avec le vent, révèlent les branches et feuillages par transparence ces éléments rentrent alors dans la composition de la photo.
Le cru de la saison 2024 de la saison photographique à l’abbaye de l’Epau est une fois de plus riche en diversité et créativité. C’est aussi une année où le lien entre les artistes invités et les équipes de l’Abbaye a été encore plus approfondi en trouvant des idées de mise en scène élégantes et surprenantes.
Quand les photos sortent de la salle d’exposition où les murs sont neutres et l’éclairage contrôlé, leur cadre devient la pierre et la nature et la lumière varie à chaque instant du jour et par les variations du temps. Les hautes herbes encadrent les photos sans cadre, les masquent en partie pour mieux les révéler, les ombres des arbres habillent les clichés et en changent la perception.
On en revient alors au thème de cette saison 2024 « Dans les hautes herbes » et à l’affiche de cette exposition qui rend hommage, à la photographie, au parc de l’abbaye et à l’expérience des visiteurs entamant le parcours auxquels ils sont invités.