Interview de Philippe Ariotti, comédien de doublage
Philippe Ariotti est un comédien de théâtre extrêmement connu pour avoir aussi une longue carrière de comédien de doublage pour des films, séries et dessin animés.
L’un de ses doublages le plu connu est Piccolo, Freezer et Oolong dans Dragon Ball.
Les 40 ans de cette série sont l’occasion de faire le portrait d’un grand comédien ayant plus de 60 ans de carrières et qui continue de jouer sur scène et faire du doublage.
Philippe Ariotti, homme de théâtre, chansonnier, opéras, opérettes et comédie musicale.
Cyril : Vous êtes principalement connu des fans d’animation pour avoir doublé quelques personnages culte de Dragon Ball entre autres. Mais je voudrais revenir un petit peu sur votre parcours. Vous avez commencé dans le théâtre lyrique et que vous avez fait beaucoup de Cabaret et fait de la comédie musicale dont la 1ère adaptation d’Un Violon sur le Toit. Est ce que vous pouvez nous en parler ?
Philippe Ariotti : Oui j’ai fait un violon sur le toit quand la comédie musicale est venue en France. La mise en scène était de Jerome Robbins, celui qui a mis en scène West Side Story.
J’ai auditionné parce qu’ils ont voulu faire l’adaptation française. La pièce se jouait à Londres et à Broadway aussi elle s’est jouée un nombre fois incalculable.
Le directeur avait un peu peur que ça ne marche pas parce que les comédies musicales ne marchaient à l’époque pas très bien en France et il a quand même pris le risque et on l’a joué 400 fois, donc succès quand même.
Puis on a tourné dans toute la France et en Belgique en Suisse au Luxembourg enfin dans tous les pays francophones. Je faisais le jeune premier.
Cyril : Oui tout à fait vous faisiez l’un des prétendants des filles de Tevye le personnage principal.
Philippe Ariotti : c’est ça, le père de la jeune fille ne voulait de lui parce que c’était un pauvre tailleur donc il pensait qu’il ne gagnerait jamais sa vie et voulait qu’il épouse le boucher. Mais finalement sa femme lui dit « mais non mais non mais non ils vont être Heureux » et lui fait croire qu’elle a eu un rêve et lui dit « non il faut que ta fille épouse le tailleur, elle sera très heureuse avec lui voilà. »
Cyril : Vous avez tiré quoi de cette expérience ?
Philippe Ariotti : D’abord d’avoir été choisi c’était bien et puis d’avoir travaillé avec des acteurs expérimentés. Jerome Robbins lui n’a pas pu venir superviser la mise en scène mais il a envoyé son assistant principal qui était un américain qui s’appelait Richard Hackman et qui était de l’acteur studio.
Donc j’ai pu travailler exactement comme tous les acteurs de l’acteur studio. C’était une grande satisfaction de pouvoir travailler avec lui. Il nous laissait faire exactement ce qu’on voulait mais finalement il arrivait exactement à ce que lui voulait, ça c’était extraordinaire.
Je devais mettre la nappe d’un côté Les fourchettes à tel endroit, c’était absolument cadré.
J’en conserve un très très bon souvenir.
Cyril : Vous avez continué après à faire du théâtre. Vous avez fait aussi fait du Offenbach mais avec le temps vous avez arrêté de chanter. Est-ce que c’est quelque chose qui vous manque ?
Philippe Ariotti : Un petit peu mais ça s’est fait comme ça. C’est à dire que j’ai beaucoup chanté du Francis Lopez (Le chanteur de Mexico, Violettes impériales, La belle de Cadix). Pour Offenbach j’ai eu la chance de jouer La Vie Parisienne à l’Opéra Comique et au Chatelet et dans tous les grands théâtres de France. J’ai joué à l’opéra de Lyon à l’opéra de Strasbourg à l’opéra de Bordeaux et à l’opéra de Genève, qui est un des plus beaux théâtres que j’ai vu.
J’ai joué L’auberge du Cheval Blanc mais aussi un peu d’opéra dont L’Heure Espagnole de Maurice Ravel avec des grands noms du lyrique de l’époque.
Je me suis arrêté de compter à 100 le nombre d’opérettes que j’ai joué et une bonne quinzaine d’opéras.
Le rapport au public.
Cyril : Impressionnant, qu’est-ce que vous avez apprécié de travailler sur scène en contact avec le public ?
Philippe Ariotti : Avant tout un comédien ou un chanteur qui travaille c’est le théâtre, qu’il soit lyrique, dramatique. En ce moment je termine de jouer encore pour quelques représentations L’Ecole des Femmes de Molière au Théâtre du Nord Ouest à Paris. Je suis très content on a joué déjà 70 fois. Avant tout un comédien ou un chanteur enfin un interprète c’est le théâtre
Evidemment quand on joue au théâtre, la pièce marche, ne marche pas ou moins bien. Vous avez du succès, vous n’en avez pas, vous en avez moins, vous en avez plus.
C’est très bien, c’est merveilleux, c’est génial mais La différence justement quand je suis entré dans le doublage quand on enregistre on ne sait pas si ça va marcher ou pas et j’en ai fait à peu près 3000 dont bien sûr Dragon Ball.
Cyril : Oui j’ai vu et c’était terrifiant en fait je me suis dit par où commencer pour cette rencontre.
Après quelques éclats de rire.
Philippe Ariotti : Alors 30 35 ans après juste avant que j’arrive pour cette interview il y a eu au moins 10 personnes qui m’ont approché en disant merci Monsieur Vous avez bercé mon enfance. C’est Un peu les applaudissements qu’on a bien longtemps après et ça c’est formidable.
Donc il y en a qui peuvent dire que le doublage c’est moins noble mais c’est autre chose et bien.
Philippe Ariotti, comédien de doublage les soaps et les débuts.
Cyril : Vous avez basculé en effet sur le doublage et avant d’aborder le doublage d’animation, je voudrais évoquer la quantité très impressionnante de doublage de soap opéra tels Dallas, Amour Gloire et Beauté.
Philippe Ariotti : Oui pendant 6 ans.
Cyril : En effet vous êtes pour ma grand-mère qui a à peu près votre âge LA voix de Guthrie dans Amour Gloire et Beauté. (Philippe Ariotti rit). Comment est-ce que vous avez commencé le doublage ?
Philippe Ariotti : Il y avait longtemps que je voulais en faire et puis je savais que c’était quand même Assez difficile et qu’il fallait que je fasse un stage pour ça. Parce que on ne peut pas s’improviser comme ça. J’avais déjà 45 ans et j’étais à Paris à ce moment-là car pendant deux ans j’étais au Théâtre des Deux Anes avec tous les chansonniers connus à l’époque comme Jacques maillot.
Je jouais tous les soirs et donc j’en ai profité à ce moment-là, puisque je faisais moins de province, pour faire un stage de doublage et quand s’est terminé les deux ânes timidement j’ai commencé à entrer dans le monde du doublage.
J’ai rencontré un comédien génial qui s’appelait Pierre Trabaud (Tortue Géniale, Daffy Duck) qui lui dirigeait déjà beaucoup de doublage.
Il avait tourné un film qui s’appelait Le Voleur de Feuilles dans lequel je faisais la chanson et qui m’a dit « viens si ça t’intéresse ».
Et puis comme ça petit à petit c’est comme ça que j’ai grandi dans le doublage. Je n’ai pas abandonné le théâtre pour tout dire mais je dois dire que rester à Paris c’était plus confortable et comme ça marchait bien j’ai continué.
Cyril : Dans le doublage j’ai noté que vous avez fait beaucoup de doublage aussi de cinéma mais ce que je trouve très Intéressant et c’est pour cela que je parlais des soap opéras juste avant, c’est que vous avez été amené à doubler pendant très longtemps le même personnage joué par le même acteur.
Comment justement vous avez abordé ce type de rôle ? De voir pendant cinq six ans ce même personnage qui revient par un même acteur. Est ce qu’il y a des choses qui évoluent ?
Philippe Ariotti : Je trouve que c’est tout à fait intéressant. Dans Amour Gloire et Beauté c’était Un personnage interprété par un très bon l’acteur (Ken Hanes). On a plus de facilité à doubler un acteur qui est très bon un acteur. Bien sûr la série elle vaut ce qu’elle vaut mais moi j’ai pris beaucoup de plaisir à le doubler.
Le défi de reprendre le rôle d’Hercule Poirot après Roger Carel.
Cyril : Pour moi vous êtes La voix du papa des enfants dans les films des ewoks vous avez bien évidemment à votre actif la voix de Piccolo et Freezer dans Dragon Ball, pour la génération de mes parents vous étiez dans Inspecteur Barnaby, pour mes grands parents Dallas et Amour gloire et Beauté.
Comment vous abordez depuis plusieurs générations les personnages que vous jouez ?
Philippe Ariotti : Quand j’ai commencé à faire du théâtre j’ai presque tout de suite joué des rôles de composition. J’ai joué des rôles Jeunes premiers bien sûr un petit peu mais pas beaucoup parce que j’avais une passion pour la composition. Quand j’avais 25 ans je jouais déjà des vieux enfin pas forcément tout le temps mais des rôles de composition.
Par exemple Roger Carel, qui était aussi un peu mon maître, que je connaissais bien et qui était un ami, quand il n’a plus pu tourner j’ai dû reprendre ses rôles notamment Martin Matin qui passait beaucoup Cher Président et Hercule Poirot.
Cyril : C’est un rôle iconique.
Philippe Ariotti : Ils se posaient la question de comment on va faire. Les gens avaient entendu déjà plus de 60 épisodes avec Roger Carel on ne pouvait pas interrompre la série puisqu’il restait quand même beaucoup d’épisodes à doubler et il fallait trouver quelqu’un mais pas quelqu’un qui imite Roger Carel.
J’ai passé l’audition, on était beaucoup puis après plus que trois plus que deux et j’ai eu le rôle.
Cyril : Félicitations déjà et c’est vrai que passer derrière quelqu’un qui a été aussi impactant c’est un exercice assez compliqué.
Philippe Ariotti : Oui ça avait beaucoup marqué c’est vrai mais je n’ai pas cherché à l’imiter ni à faire quelque chose de spécial, de différent. Je me suis beaucoup basé que la voix de David suchet qui est un acteur shakespearien extraordinaire.
Encore une fois quand on double de très bons acteurs c’est quand même plus facile de doubler des moins bons et lui fait partie des très très Grands puisqu’il a travaillé avec Lawrence Olivier.
Shakespeare donc pour Hercule Poirot.
J’ai suivi un peu son jeu, ses appuis j’ai bien travaillé afin de voir exactement ce qu’il faisait et puis la voix elle s’est calée dessus. Je dois dire et j’ai eu très peur parce que dans ces cas-là on se dit « comment ça va être reçu ? » et ça a été, il y a des gens bien sûr qui ont dit « ah c’est pas tout à fait la même voix » mais dans l’ensemble les audiences n’ont pas baissé.
A la première diffusion ça fait toujours plus d’un million de téléspectateurs c’était quand même très bien. Les épisodes sont passés repassés et je crois qu’ils passent toujours et ça j’avoue que j’étais quand même très content et Roger Carel aussi était content.
Il a même vu les épisodes où j’étais et comme il se souvenait plus tellement ce qu’il avait fait ou ce qu’il n’avait pas fait quelquefois il savait plus c’était lui ou moi alors ça c’était vraiment…
Cyril : là c’est l’adoubement.
Philippe Ariotti : Exactement.
Le doublage d’animation, Dragon Ball.
Cyril : Vous avez doublé de nombreuses productions de Japanimation. Evidemment il y a Dragon Ball mais plus généralement comment vous avez abordé de ne plus avoir comme support un acteur ?
Philippe Ariotti : Pratiquement dès Le départ on m’a donné des dessins animés il y en a qui aiment pas du tout ça qui avaient du mal moi ça me plaisait beaucoup car j’aime beaucoup faire des compositions. Ce qui était bien c’était que c’était vraiment de la création. En japanimation j’ai doublé Pinocchio, le livre de la Jungle j’en ai fait beaucoup, enfin beaucoup moins que Dragon Ball.
A l’époque Les séries duraient non pas huit épisodes comme maintenant mais 45 50 épisodes.
Cyril : Arrivons à Dragon Ball justement, comment vous tombez sur ce projet ?
Philippe Ariotti : J’étais sur un manga qu’on appelait alors à peine manga qui s’appelait Sab Ryder et Pierre Trabaud qui dirigeait ce manga justement me dit de venir et bon il m’avait vu que dans des petites choses.
J’ai essayé un personnage et puis m’a demandé si je pouvais ma voix pour essayer un autre. C’était pas des grandes choses mais il a vu que je changeais facilement ma voix. Il s’est trouvé qu’un acteur qui jouait dedans est parti en tournée théâtrale. Je l’ai remplacé et c’est comme ça que j’ai eu le rôle du cochon Oolong.
Après est venu Piccolo qui était un méchant qui ensuite est devenu gentil et s’appelait Satan Petit Coeur, Freezer et le sorcier Babidi.
Le succès de Dragon Ball.
Cyril : Et à quel moment vous vous êtes rendu compte que ces personnages devenaient autre chose qu’un doublage parmi des tas d’autres ? Le retour du public finalement vous l’avez eu quand à quel moment ?
Philippe Ariotti : On l’a eu principalement à l’arrivée d’internet. Parce que les gens ne savaient pas qui on était et sur le générique ce n’était pas marqué du tout. Mais je savais que les épisodes marchaient parce qu’il n’y avait pas Internet à l’époque mais l’époque mais il y avait le minitel.
Ça a l’air d’une bêtise mais ça passait au Club Dorothée il y avait toujours les téléspectateurs qui votaient et on voyait que Dragon Ball arrivait toujours en tête.
Je me suis dit il y a quelque chose qui se passe effectivement. Puis Brigitte Lecordier qui joue Songoku a été invitée au Japon et on se demandait pourquoi.
Cette série marchait au Japon bien entendu mais on s’étonnait qu’en France ça marche si bien or c’est Vrai que. Brigitte a fait une émission très connue très cotée là-bas à Tokyo et puis après Les Japonais sont venus ils sont venus nous voir enregistrer un épisode.
Dragon Ball s’est finie puis est venu Dragon Ball Z et le succès s’est confirmé.
Cyril : La culture japonaise a un rapport avec le doublage d’animation très différent de la France. Pour le coup on met beaucoup en avant les comédiens de doublages qui sont extrêmement valorisés. En France nous avons ça un petit peu maintenant.
Justement des évènements comme l’invitation de Brigitte Lecordier au Japon a offert un éclairage sur l’ensemble de la profession.
Philippe Ariotti : Absolument et quand je suis allé au Japon en 2018 j’ai eu la chance de pouvoir rencontrer Ryusei Nakao qui est le Freezer original si j’ose dire. On s’était donné un grand restaurant en plein centre de Tokyo et je me suis aperçu quand il est arrivé que les gens le reconnaissaient dans le restaurant. On les appelle d’ailleurs de seiyu et qu’ils sont très importants. Du reste il double uniquement Freezer mais il fait beaucoup d’autres choses dont du théâtre.
Quand on double personnage animé c’est très Intéressant et le succès qu’on remporte ici aux conventions à Paris manga comme d’autres conventions j’en ai fait peut être une bonne centaine on s’aperçoit que les gens sont très émus parce que bien sûr Ils savent très bien qu’il y a une voix c’est Pas le dessin qui parle. Mais quand ils voient la voix si j’ose dire sans le dessin et qu’ils me demandent immanquablement une phrase de Freezer ou la voix de Piccolo.
Avec la voix que je prends ça les impressionne énormément.
Cyril : Et je pense que c’est lié aussi au fait qu’il Y a quelque chose de l’enfance qui remonte tout à coup et cela vaut pour toutes les générations.
Philippe Ariotti : oui absolument.
Le doublage en France.
Cyril : Et puis en France 80% de la population je pense facilement voit toutes les productions dans un doublage français. Du coup vous êtes l’âme des personnages tels que les français les connaissent. Ce n’est finalement qu’une minorité très parisienne en fait qui regarde tout en version originale.
Philippe Ariotti : oui vous savez ça a toujours été quand j’étais jeune étudiant où tous les films sortaient en version française et dans quelques salles d’art et d’essai les gens allaient voir la version originale sous-titrée.
Cyril : Est-ce que vous êtes essayé à faire de la direction de doublage ?
Philippe Ariotti : Non jamais jamais et j’aurais bien aimé. Mais ça ne s’est jamais produit mais Je lance un appel.
Cyril : Comment est-ce que vous voyez l’évolution qu’il y a eu technologique et technique dans le doublage ?
Philippe Ariotti : Elle a été énorme parce qu’il n’y avait pas le numérique. Par exemple pour les premiers épisodes de Dragon Ball il y avait je crois que deux pistes ou trois pistes.
On ne pouvait pas s’amuser à enregistrer ensemble et si quelqu’un se trompait qu’on chevauchait c’était un peu embêtant.
Maintenant on enregistre tout seul un comédien et il y a nombre de pistes infinies ou presque. Mais l’ennui c’est que souvent on enregistre seul ou à deux au maximum. Là j’ai fait une série pour Netflix heureusement et j’avais des scènes avec une partenaire et c’était très agréable de la faire de pouvoir doubler les huit épisodes je devais être avec elle dans cinq ou six épisodes.
C’est une série assez amusante d’ailleurs qui se passe dans un EHPAD.
Game of Thrones, le doublage du Grand Moineau.
Cyril : En parlant d’évolution du doublage je voulais revenir aussi sur celui de Game of Thrones. Vous avez fait la voix de Jonathan Price dans le rôle du Grand Moineau. Comment s’est passé le doublage qui avait pour particularité de devoir être fait très rapidement la diffusion aux USA étant dans la nuit du dimanche au lundi et l’épisode doublé pour le lundi soir ?
Philippe Ariotti : On m’a appelé pour ce doublage et je n’avais jamais travaillé avec ce directeur, qui était très bien d’ailleurs, mais je le connaissais. Jonathan Price est un très bon acteur et donc je me suis mis dans la peau de ce personnage voire dans la voix de ce personnage si j’ose dire. C’était un rôle très intéressant au départ c’est un très gentil mais se révèle épouvantable.
Cyril : Avec une fin très marquante…
Philippe Ariotti : Oui une fin très marquante en effet, là on sait qu’on ne reviendra pas la semaine suivante. Du reste j’ai doublé assez souvent Jonathan Pryce au moins dans 7 ou 8 films dont le dernier film d’Antony Hopkins (Une Vie réalisé par James Hawes) dont deux scènes ensemble où ils étaient ensemble.
Cyril : Est-ce qu’il y a un rôle qui vous a tout particulièrement marqué et dont vous êtes fier non pas par son succès mais par le défi qu’il a représenté ?
Philippe Ariotti : Il y a beaucoup de rôles qui était difficile qui n’était pas pour moi au départ, pour lesquels on n’aurait pas du tout pensé à moi et je les ai fait et je me suis vraiment beaucoup plus là dedans. Par exemple il y a une dame qui est passée c’est pas du tout du tout elle m’a fait signer quelque chose j’ai dit bon c’est pour le personnage et elle m’a dit « ah non non non c’était pour une série qui s’appelait True Blood où vous faisiez le shérif. »
J’étais surpris qu’on me dise ça. J’ai pris énormément de plaisir à faire ce personnage qui était une espèce de shérif complètement très cajun.
Pour moi un rôle c’est toujours un défi.
Le futur du doublage et l’IA.
Cyril : Nous allons reparler un peu de Brigitte Lecordier qui a sorti une vidéo cette année tirant la sonnette d’alarme sur l’utilisation des IA, vidéo à laquelle vous avez participé aussi. Je voudrais qu’on conclue en évoquant ce sujet là.
Philippe Ariotti : C’est un sujet très important. L’intelligence artificielle c’est formidable pour des tas de choses mais il faut en voir le danger. Nous sommes allés voir un avocat à ce sujet et c’est en cours.
Je crois que l’IA est quelque chose qui peut être dangereux. Ils ont des kilomètres d’enregistrements de nos voix et avec la technique maintenant la question se pose de qu’est ce qu’il va en rester et ce que l’on pourrait en faire.
Partir de l’idée qu’un doublage peut être fait par une voix de synthèse et que ça n’a pas d’importance et bien non je ne trouve pas.
Cyril : Vous avez dit vous-même tout au long de notre échange que vous êtes un acteur de composition et l’IA ne permet pas cela et ne peut offrir que quelque chose de désincarné. Elle doit être là pour apporter aider et soulager sur certains points pour laisser l’opportunité à l’humain de s’épanouir.
Philippe Ariotti : Je pense que c’est au public à présent de réagir et faire entendre sa voix.
Pour conclure qu’est-ce que veut dire une version originale ? Quand vous avez une coproduction où il y a des acteurs de multiples pays.
Quelle est la version originale du Guépard avec Delon ? Est-ce que c’est la version où Delon parlait en français, celle où Claudia Cardinale parlait en italien ou celle où Burt Lancaster parlait en américain ?
Propos recueillis durant Paris Manga by TGS le 03 octobre 2024