Printemps 1945. Juché sur sa bicyclette, Louis, jeune lycéen prometteur, parcourt Paris libéré depuis peu, passant de ses révisions pour le baccalauréat à son travail au cinéma Pax. Jusqu’à ce jour du 22 mai, où il aperçoit le visage d’une jeune fille, assise dans un des nombreux bus qui se rendent à l’hôtel Lutetia où transitent les rescapés des camps de concentration nazis. Les douze jours qui suivront changeront sa vie. Louis s’engage comme bénévole et s’occupe des « revenants ». Il fait la connaissance de Sylvette et d’Édith, la jeune fille du bus, pour qui chaque moment de solitude, chaque bruit, renvoie inévitablement à l’enfer traversé. Comment les aider ? Comment concevoir l’ampleur de cette horreur ? Alors Louis lit, relit et conserve les articles de presse sur le sujet, interroge son ancien professeur de français, M. Couty, résistant, pour que rien ne soit oublié. Peut-être est-ce aussi pour défier son père qui, lui, a fait d’autres choix…
Une histoire dans la grande Histoire, celle de la France au printemps 1945, entre la joie retrouvée à la Libération et la confrontation de chacun aux rescapés de l’indicible. C’est Louis qui se confronte au mutisme d’Edith, jeune fille de son âge sortant des camps de Birkenau, en essayant de l’aider à vivre de nouveau, sans culpabilité.
Les couleurs sépia de l’album donnent un aspect de vieilles photos du siècle dernier, jaunies, qui cadrent parfaitement avec l’ambiance feutrée de l’hôtel Lutetia. Sauf lorsqu’Edith replonge dans ses souvenirs des camps, les traits sont alors presque rouges et la violence transparaît. Le titre reprend l’idée que lorsque ses cheveux auront repoussés, Edith sera une nouvelle fille, aura une nouvelle vie, comme avant les camps où elle a été rasée pour la déshumaniser. Tache complexe.
Cet album est un beau travail de mémoire car on parle rarement de cette période de transition pour les rescapés des camps. La jeunesse des protagonistes accentue ce besoin de transition et les décors de l’hôtel de luxe ajoutent du contraste avec l’horreur qu’Edith ne peut s’empêcher de revivre.
Éditeur : Dargaud – Genre : Roman graphique, récit historique – Scénario : Blanchut Fabienne et Locandro Catherine – Dessin : Dawid – Date de parution : 5 septembre 2025 – 160 pages – Prix : 22,95€
