Madre réalisé par Rodrigo Sorogoyen
Dix ans se sont écoulés depuis que le fils d’Elena, alors âgé de 6 ans, a disparu. Dix ans depuis ce coup de téléphone où seul et perdu sur une plage des Landes, il lui disait qu’il ne trouvait plus son père.
Aujourd’hui, Elena y vit et y travaille dans un restaurant de bord de mer. Dévastée depuis ce tragique épisode, sa vie suit son cours tant bien que mal. Jusqu’à ce jour où elle rencontre un adolescent qui lui rappelle furieusement son fils disparu…
Rodrigo Sorogoyen a précédemment réalisé Que dios nos perdone en 2016 et El Reino en 2018, 2 très bons thrillers dans des ambiances très différentes. Ici avec Madre c’est une autre atmosphère qu’il tisse toujours dans ce genre.
L’origine du film vient d’un court métrage réalisé en 2016 qui est devenu la scène d’ouverture du film et raconte du point de vue d’Elena la disparition de son fils alors que le réalisateur voulait explorer les conséquences du traumatisme de la disparition.
Marta Nieto qui incarne Elena est vibrante d’émotion. Jules Porier dans le rôle de Jean est impressionnant pour son jeune âge. Leur duo fonctionne très bien et tisse une relation sur le fil entre une relation mère/fils et quelque chose plus ambigüe.
La scène d’ouverture du film, qui correspond donc au court métrage, est un long plan séquence spectaculaire du point de vue d’Elena dans son appartement madrilène et entendant son fils de 6 ans au téléphone lui annonçant qu’il ne sait pas où est son père, est seul dans la plage et voit un homme inconnu s’approcher. L’action se passe à l’autre bout du fil et nous ne voyons rien mais la tension dans l’appartement est à couper au couteau.
Le film a été principalement tourné dans les Landes à Vieux Boucau et exploite l’immensité de la plage s’y trouvant et l’atmosphère des bois des pins environnants alternant des séquences de tous les jours lumineuses et enjouées et des séquences fixes de la plage vide dont seul le grondement des rouleaux des vagues s’écrasant sur le sable retentissent et que voit Elena à chaque fois qu’elle dort.
Cette dernière vit depuis 10 ans là bas et ne se laisse pas l’occasion de faire son deuil travaillant littéralement sur la plage où il a disparu comme un rappel constant de cet endroit où elle n’a pas pu être quand il l’a appelé au secours. Sa rencontre avec Jean est l’électrochoc dont elle avait besoin.
Le film est tourné aussi bien en français qu’en espagnol, Elena ayant logiquement acquis la maitrise de la langue à force d’y vivre. Pour apporter plus de naturel aux dialogues, en particulier ceux en français, Rodrigo Sorogoyen s’est appuyé sur ses acteurs.
Madre a reçu le Prix de la meilleure actrice de la section Orizzonti pour Marta Nieto à la Mostra de Venise 2019. Il a été sélectionné en compétition au Festival du cinéma méditerranéen de Montpellier 2019 et nominé pour la meilleure actrice, meilleur scénario adapté et meilleur montage à la 34e cérémonie des Goyas (l’équivalent, en Espagne, des Césars Français ou des Oscars Américains).
Madre est un bon film, bien mené et avec des acteurs en parfaite harmonie nous offrant aussi bien des séquences dramatiques, qu’émouvantes et drôles.
Genre : thriller dramatique – Nationalité : Espagnole – Durée : 2h09 – Avec Marta Nieto, Jules Porier, Anne Consigny et Alex Brendemühl – Date de sortie : 22 juillet 2020 – Distributeur : Le Pacte.