Une vie en parallèle de Matthias Lehmann
Karl Kling est brouillé avec sa fille depuis plusieurs années. Il commence pourtant à lui écrire une longue lettre, afin de lui dire qui est cet étranger qu’il fut pour elle… De l’après-guerre aux années 1980, tiraillé entre adaptation et rébellion, Karl s’est efforcé de répondre aux normes bourgeoises et a vécu son homosexualité en secret. Une vie en parallèle livre un récit délicat, en retenue mais très évocateur des tourments intérieurs de Karl et du courage de s’ouvrir enfin malgré toutes les résistances.
Le récit se passe en Allemagne et c’est un point important car sur la période que recouvre le récit c’est un pays qui est coupé par un mur. La vision à l’est et à l’ouest de ce mur ne sera pas la même sur « ce qui se fait », ce qui est acceptable ou non. Cependant, si l’on rappelle que l’homosexualité est proscrite et punie jusqu’en 1994 là-bas, on comprend mieux le point de vue de Karl, pétrit de contradictions. Mais ce récit reste universel car à l’époque, il était difficile d’assumer au grand jour une telle différence.
J’ai beaucoup aimé ce récit qui fait des sauts dans le temps pour expliquer les hésitations et écrire l’histoire d’une vie, d’un homme qui ne peut s’empêcher d’aimer les hommes et d’avoir des pulsions sexuelles et de tomber amoureux d’hommes. Son récit est construit autour de cette thématique car les 450 pages de cette BD ont pour but qu’un père explique à sa fille qui il est. Tout est en finesse et délicatesse, surtout le dessin, tout en noir, blanc et gris, avec des ombres, et on ne les voit pas passer toutes ces pages. Ce n’est pas un récit à proprement parlé autobiographique puisque Matthias Lehmann et né en 1983. Mais la sincérité de cette histoire est touchante.
Éditeur : Steinkis – Genre : Roman graphique – Scénario et dessin : Matthias Lehmann – Date de parution : 14 avril 2022 – 464 pages – Prix : 28 €.