La Deuxième Femme écrit par Louise Mey
Louise Mey, née en 1983, est une écrivaine féministe française vivant à Paris, auteure de romans policiers.
Sandrine ne s’aime pas. Elle trouve son corps trop gros, son visage trop fade. Timide, mal à l’aise, elle bafouille quand on hausse la voix, reste muette durant les déjeuners entre collègues.
Mais plus rien de cela ne compte le jour où elle rencontre son homme, et qu’il lui fait une place. Une place dans sa maison, auprès de son fils, sa maison où il manque une femme. La première. Elle a disparu, elle est présumée morte, et Sandrine, discrète, aimante, reconnaissante, se glisse dans cette absence, fait de son mieux pour redonner le sourire au mari endeuillé et au petit Mathias.
Mais ce n’est pas son fils, ce n’est pas son homme, la première femme était là avant, la première femme était là d’abord. Et le jour où elle réapparaît, vivante, le monde de Sandrine s’écroule.
Dès les premières pages la thématique poignante, liée à la condition féminine, nous transperce les entrailles par des mots durs, une plume acérée dotée d’une volonté irrémédiable de nous secouer. C’est un véritable électrochoc !
On découvre, à l’aide d’une narration omnisciente à la troisième personne, Sandrine, cette deuxième femme… Femme tourmentée, esseulée, complexée pour ne pas dire paumée qui met tous ses espoirs dans l’Amour, avec un grand A… Celui qu’elle s’imagine et aussi celui qu’elle va provoquer, certes, mais avant tout subir, malgré elle… On y découvre une femme qui va nous exaspérer mais qui va aussi nous toucher, provoquant forcément en nous une certaine empathie à travers ses douleurs, ses pensées les plus intimes, autodestructrices parfois, et sa façon de percevoir ce clivage homme-femme encore trop archaïque et pesant voire carrément dévastateur… La femme, son corps, sa perception, d’elle-même, par elle-même et à travers les autres, aussi, et surtout. Ce récit est bourré de souffrance, d’absence d’estime de soi… On y sent toute la torture psychologique, d’une force incroyable avec fulgurance… L’emprise, les violences conjugales et ce harcèlement moral, décortiqués avec soin nous percutent de plein fouet. Angoisses, manipulation, engrenage, comment se sortir de tout ça ? Comment seulement le vouloir quand on s’est oubliée soi-même derrière une figure masculine machiavélique et tyrannique ?
Mais… mais… je me suis malheureusement souvent ennuyée. Pourquoi ? Parce que malgré mon empathie j’ai quand même eu du mal à m’attacher à Sandrine, parce que cette histoire je l’ai vécue avec distance, et elle ne m’a pas transportée réellement même si l’idée de fond est là et qu’elle est somme toute très bien exploitée. Il m’a manqué plus d’action, contre moins d’introspection. Il m’a manqué plus d’espoir, contre moins de fatalité… Et ce qui m’a vraiment déroutée c’est ce style brut, tortueux… où tout se mélange sans limites précises… J’aurais aimé moins de libertés typographiques, au minimum. J’ai été parfois au bord de l’indigestion avec toutes ces pensées et ces dialogues mêlés au récit sans aucune indication classique (et pour ma part très utile) de type guillemets ou tirets cadratins. Je vous en livre donc un avis mitigé certes mais pas mauvais, attention. Avis personnel au demeurant et je vous invite à découvrir ce roman poignant, profond et… incontestablement unique. J’avais adoré Louise Mey dans Les Ravagées et je n’hésiterai pas une seule seconde à me plonger de nouveau dans ses mots, qui représentent toujours une analyse très fine et pertinente de notre société à travers ses yeux de féministe assumée.
Éditeur : Le Masque – Date de parution : 15 janvier 2020 – 336 pages – Prix : 20 €.